Solutions à l'endettement de la République de Genève

Genève n'a autrefois été forte que lorsqu'elle était riche et indépendante. Si elle veut retrouver sa gloire d'antan, il lui faut faire de nouveau preuve d'audace et de courage afin de repousser de toutes ses forces vives l'escalade des dettes qui cherchent à l'envahir et à la détruire. 404 ans après les évènements de 1602, de nouvelles marmites doivent être jetées sur l'ennemi, qui cette fois se cache au sein même de ses institutions!

Entre homéopathie et remèdes de cheval, il existe de nombreux médicaments afin de guérir notre République, dont je suggère les suivants.

1)      supprimer les doublons Ville-Canton. Le rétablissement de l'ancienne structure semi-indépendante me paraît compatible avec les institutions confédérales;

2)      réduire les traitements des Conseillers d'Etat. A ce propos, je suggère que la réforme porte surtout sur les retraites accordées aux Conseillers cantonaux, nationaux et fédéraux: étant donné que ces charges sont compatibles avec une activité professionnelle, il n'est pas nécessaire de servir une rente après l'échéance du mandat confié;

3)      rétablir l'ancien Casino de Genève, qui pourrait drainer vers Genève d'importants capitaux qui vont actuellement vers Annemasse, Divonne ou Annecy; donner aux jetons du Casino une valeur d'échange permettant de les utiliser comme monnaie interne sur tout le territoire du canton;

4)      renforcer les contrôles de validité des prestations sociales afin de supprimer les versements aux non-ayants droit (évalués à 6 % pour l'OCPA d'après un récent article de la TG);

5)      créer une Caisse cantonale d'assurance sociale offrant une couverture à 95 % des frais médicaux et hospitaliers de base. A mon avis, un tel taux de remboursement permettrait de supprimer les multiples contrats d'assurance générale et complémentaire pour un travail administratif ou informatique identique, donc plus économique;

6)      chercher d'autres sources de crédit que celles qui sont actuellement offertes par le système bancaire dont on a constaté les limites lors de la grande crise d’octobre 2008.

Concernant ce dernier point, à mon avis très important, une réflexion approfondie me paraît nécessaire, pour laquelle je propose quelques pistes de recherche. Je crois que là se trouve l'origine réelle de la gangrène financière constatée. J’ai développé ce thème dans le document http://dbloud.free.fr/monnaie.htm qu’il y a lieu de consulter en tant que base de travail.

Il ne faut pas oublier qu'environ 90 % de la masse monétaire totale sont créés par les banques ex-nihilo, c'est-à-dire par écritures comptables (voir le livre "Controverses sur la Banque et la Monnaie", 1986, J. Riboud). C'est ce qu'on appelle la "monnaie scripturale". Les fonds propres des banques ne dépassent généralement pas 35 % de l'ensemble des crédits qu'elles ont ouverts. L'argent qu'elles "prêtent" n'est en fait que virtuel: elles ne prêtent que du crédit, c'est-à-dire de la confiance en elles. En revanche, les intérêts à verser pour ces écritures représentent de l'argent réel, non scriptural, qui n'a pas été créé et qu'il faut donc retirer du circuit économique! Le prix Nobel 1988 d'économie politique, Maurice Allais, a écrit dans un de ses ouvrages, cité dans le quotidien "Le Monde" du 25 octobre 1988: "il n'y a pas de différence aujourd'hui entre le métier de faux-monnayeur et celui de banquier". Ce système de crédit par "jeu de l'avion" n'est en fait que l'application du principe préconisant de "socialiser les pertes afin de privatiser les gains", principe bien illustré actuellement par l'affaire de la BCGE.

"Pas de pitié pour les banques" avait déclaré Otto Stich, président du Groupe des Dix et chef du Département fédéral des finances, à propos de la "dette" du tiers monde (TG du 21 sept. 1989: "Dette du Tiers Monde - Banquiers, effacez-la!"). Dans la TG du 17 juillet 1998, vous aviez publié en page 34 une lettre de votre serviteur sous le titre "Les dettes de la République de Genève", dans laquelle je réagissais à un article paru le 19 juin 1998 (p. 25) au sujet du "Mythe des Dettes comptables". J'y rappelais que 90 % de la dette de Genève consiste en intérêts, qui eux-mêmes n'ont pas fait l'objet d'une création monétaire, même scripturale. "Ils doivent donc être trouvés ailleurs que dans les emprunts, au risque de devoir contracter de nouveaux emprunts pour les rembourser, ce qui ne fait que renforcer le cercle vicieux."

Dans une autre lettre, publiée par le Journal de Genève du lundi 11 janvier 1988 en page 2 sous le titre "Politique monétaire: Comme le jeu de l'avion", je rappelais que "seuls Lincoln avec ses "greenbacks" en 1861-1865 puis John Kennedy quelques mois avant sa mort, ont réussi à émettre une monnaie d'Etat non bancaire. L'on sait comment ces expériences ont été arrêtées…".

Dans la TG du mardi 17 octobre 1989 (p. 40), je répondais de la même façon à votre article paru dans la TG du 11 septembre 1989 sous le titre: "Crise de la dette: la Suisse doit prendre ses responsabilités", dans lequel M. Felber assurait que "la Suisse est décidée à empoigner le problème". Vous trouverez d'autres documents de ce type sur ma page http://dbloud.free.fr/economie.htm.

Cette mise au point fondamentale étant faite, je dois reconnaître que, même si les autorités cantonales décident de rechercher des moyens de se libérer des tentacules du système de crédit actuel, elles auront besoin de beaucoup de courage politique et qu'elles se heurteront à des obstacles insoupçonnés. L'essentiel me paraît être pour le moment d'avoir compris le procédé et pris conscience du piège mortel qu'il implique. Je vous proposerai donc quelques idées allant dans le sens d'une libération progressive, sans heurts comme il se doit dans ce pays. Payer 830 000 CHF par JOUR d'intérêts est une charge aberrante pour Genève, sans compter les milliards qui restent en rouge dans ses comptes!

1)      La première idée serait que la République lance un appel d'offres international afin de déterminer quelles seraient les banques ou organismes de crédit qui lui consentiraient les meilleures conditions (taux), sans limiter sa recherche aux seules banques helvétiques et en incluant des fondations privées à statut fiscal avantageux, comme on peut en trouver au Liechtenstein, à Monaco et ailleurs;

2)      des interlocuteurs intéressants étant trouvés, je pense que Genève pourrait entreprendre -concernant ses dettes actuelles- des négociations visant à les faire reprendre par d'autres entités au moyen d'opérations de portage légal. L'astuce ne doit pas être réservée aux seuls acteurs privés comme la BCGE;

3)      il existe à Bâle une banque privée, fondée en 1934 par des franchistes (tenants de l'Economie Franche ou Freiwirtschaft de Silvio Gesell) qui émet une monnaie interne, réservée à ses membres coopérateurs et non échangeable contre des francs suisses. Ce sont les "bons WIR" (voir http://www.wirbank.ch). Le WIR propose des crédits en CHF ou en bons WIR à des taux d'intérêt très bas (dès 1 % !) et des hypothèques Libor dès 1,78 % ! Cette banque -contrairement à ses statuts initiaux- n'accepte plus que des coopérateurs privés (entreprises ou commerces individuels). Afin de profiter des énormes avantages de cette formule, il faudrait que Genève présente sa candidature sous une forme de droit privé, par exemple en fondant une (ou plusieurs) entreprise(s) de droit privé, qui seraient coopératrices du WIR.

Un des fondateurs du WIR en 1934, M. Pierre Tapernoux, m'a rappelé qu'il en avait été exclu autrefois parce qu'il souhaitait ouvrir l'accès à la monnaie franche du WIR à toutes les personnes, privées ou publiques. Mais le WIR -peut-être par crainte de représailles comme à Wörgl en 1932 (voir référence plus loin)- a jugé plus prudent de ne s'ouvrir qu'aux seules entités privées (artisans, commerçants, entrepreneurs). Monsieur Tapernoux m'a également précisé que "la seule ville sans dette de Suisse" était celle de Saint-Gall, dont le maire fait en sorte que ses dépenses soient exactement compensées par ses recettes. M. Tapernoux possède un document à ce sujet.

4)      sans passer par un organisme bancaire, il est possible à un groupe d'individus (association, commune, canton ou Etat) d'émettre une monnaie à usage interne (comme les "bons de travail" de la ville de Wörgl en 1932, qui ont permis par exemple de construire un petit pont où l'on voit encore écrit: "Mit Freigeld gebaut" (construit avec la monnaie franche)). Cette expérience a été arrêtée par la Banque nationale d'Autriche en 1933 mais elle reste un modèle de réussite extra-bancaire.

On trouvera d'autres références sur la page du professeur Jérôme Blanc (http://www.ish-lyon.cnrs.fr/walras/Membres/jblanc.htm), qui m'a été communiquée par M. Tapernoux, ainsi que, concernant les expériences monétaires de Schwanenkirchen, Wörgl (1932) et Ithaca (N.Y., 1991-2006) sur la page http://www.onpeutlefaire.com/articles/ajh-13-les-demonstrations-du-paradigme.php, dont j'extrais, afin de terminer cet exposé, les lignes suivantes:

Voir l'article Éradiquer la pauvreté en Europe et dans les PVD. La nécessité d'un « plan Marshall » européen.
(Proposition retenue au "Congrès Européen Citoyen" - Liège 22 et 23 septembre 2001)

...dont la conclusion est la suivante :

"Si un gouvernement peut émettre des « bons du Trésor » ou des obligations d’Etat, il peut émettre des crédits sans intérêt. Les deux sont des promesses de payer, mais l'un plombe les prix, et l'autre aiderait les populations. C'est une situation terrible lorsque le gouvernement, pour augmenter la richesse nationale, doit s'endetter et se soumettre à payer des intérêts ruineux à des structures privées qui contrôlent la valeur fictive de la monnaie. Dans un système où la monnaie est créée par le système bancaire privé, avec intérêt, chaque fois que nous voulons augmenter la richesse nationale d’un pays, nous sommes forcés d’accepter une augmentation de sa dette.

Un Plan Marshall Européen à destination des PVD et de l'Europe elle-même "est possible" et cela ne nous appauvrirait en rien, au contraire puisqu'il permettrait de développer une production écologiquement orientée en créant des emplois. C'est maintenant aux techniciens de la monnaie et aux économistes de proposer un "schéma pratique". Mais il est évident qu'il ne sert à rien d'un côté d'aider ces pays pauvres par une action telle que celle‑ ci tout en les étranglant d'un autre en leur réclamant une dette et les intérêts qu'ils ne peuvent payer sans des sacrifices que nous n'oserions sûrement pas demander à nos propres populations."

Proposition de structure administrative de la Ville-République de Genève

Cette proposition fait suite à la réflexion de M. J.-F. Mabut sur les communes genevoise, parue en page 8 de la TG du vendredi 13 janvier 2006 sous le titre « Zéro, trois dix ou 49 ? ». Il faut en effet entrer dans le détail du projet de fusion Ville-Etat et se poser la question de la formule de « l’équation communale » afin d’éviter les dispendieuses dispersions et redondances actuelles. Une telle réforme constitutionnelle, votée par le Grand Conseil, pourra être facilement validée par l’application du droit de référendum cantonal, mais en réunissant dans le Conseil général des électeurs tous les résidents, donc les étrangers déjà bénéficiaires du droit de vote communal (dont je fais partie).

Le Grand Conseil (100 députés) et le Conseil d’Etat (8 personnes/départements) matérialisent bien la séparation des pouvoirs législatif et exécutif mais ces deux instances ne constituent pas un bicaméralisme législatif moderne, adapté à l’existence des 49 communes périphériques. La structure de la République doit être triangulaire (un exécutif avec deux chambres législatives). Il manque la chambre représentative des entités locales, c'est-à-dire un Sénat faisant pendant au Grand Conseil pour la mise au point des lois qui devront être appliquées par le Conseil d’Etat. La représentation à ce Sénat devrait être équivalente à celle de la chambre des députés du canton, soit 100 personnes élues par chaque commune. La Ville de Genève et ses multiples communes y seraient représentées selon une proportion à définir en fonction des densités démographiques.

Un tel Sénat s’assimilerait naturellement à la « Communauté de communes » suggérée par l’ancien maire de Cologny car il assurerait l’unité et la coordination des décisions d’ordre territorial (communications, voirie, etc.) tout en évitant « l’émiettement des compétences » et leurs coûteuses redondances. Le domaine d’action des conseils municipaux serait alors redéfini de façon à limiter leurs compétences aux questions purement locales. Pour ce qui est du bassin lémanique, l'on pourrait concevoir une entité reprenant à peu près les dimensions de l'ancien département français du Léman, qui comptait en 1798 les 3 arrondissements de Genève (10 cantons), de Bonneville (9 cantons) et de Thonon (4 cantons) ou ce qu'on appela ensuite les "Communes Réunies", c'est-à-dire les 7 communes du pays de Gex et les 24 communes savoyardes environnantes. Pourquoi ne pas imaginer que le futur Sénat de Genève puisse -aux fins de l'optimisation de la gestion régionale- comporter des élus de ces 31 communes françaises, qui viendraient s'ajouter aux élus des 49 communes genevoises, ce qui représenterait 80 sénateurs, complétés par 20 autres pour la Ville de Genève?

Concernant le Conseil d'Etat, il me semble que son Président, élu par ses pairs, pourrait voir ses attributions élargies dans le sens voulu par le canton de Vaud, c'est-à-dire « assurer la cohérence de l’action gouvernementale » et jouer ainsi le rôle autrefois rempli par le Chancelier et par l’Avoué avant l’arrivée des Syndics en 1309.

Denis Bloud

A toute fin utile, j’ai reproduit ci-dessous cette sympathique lettre de M. Claude Martens qui lance un appel à une moralisation des autorités genevoises (espérons qu’il sera entendu):

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